Monsieur le président, monsieur le ministre, ma question comporte deux volets. Je souhaitais, d’une part, poser au ministre la question plus générale des violences lors des manifestations et, d’autre part, la question plus particulière de la violence à l’égard des policiers.
En novembre 2014 déjà, de nombreux policiers avaient été blessés lors de la grande manifestation nationale. Ce 24 mai dernier, à nouveau, tant des manifestants que des policiers ont été blessés. Dans les deux cas, le journal d’investigation Résistances.be a révélé que, parmi les personnes qui ont agressé durant les manifestations, se trouvaient des « casseurs » provenant de groupuscules militants néonazis hollandais. Ceux-ci ont clairement été identifiés lors des échauffourées avec les forces de l’ordre en fin de parcours.
Depuis plusieurs années, ces militants hollandais sont en contact en Belgique avec des groupuscules fascistes et reviennent régulièrement sur notre territoire, notamment pour infiltrer les manifestations syndicales.
Plus grave encore, la violence semble ne plus être le fait de quelques « casseurs » mais accompagne de plus en plus régulièrement, et de manière structurelle, les mouvements de contestation sociale chez nous comme dans d’autres pays européens.
Monsieur le ministre, d’une part, où en sont les groupes de travail sur la violence à l’égard des policiers mis sur pied par votre prédécesseur, Mme Milquet, à la suite des incidents de l’été 2012? Le syndicat policier plaide depuis longtemps pour la généralisation d’une formation en tactique d’intervention et en gestion de la violence. Pourquoi celle-ci n’est-elle pas encore généralisée?
D’autre part, la police est-elle au courant de la présence de ces personnes, de ces groupuscules néonazis hollandais sur notre territoire et durant les manifestations? Ces « casseurs » sont-ils fichés par la police et font-ils l’objet d’une surveillance particulière? Combien d’arrestations administratives ont-elles été opérées lors de la manifestation de ce 24 mai 2016? Combien concernent-elles des militants de l’extrême droite? Enfin, quelles mesures vont-elles être prises pour éviter que de tels actes de violence aient lieu lors des prochaines manifestations?
Jan Jambon, ministre: Monsieur le président, monsieur Vanden Burre, lors de la précédente législature, les ministres de l’Intérieur et de la Justice ont effectivement convenu, avec les partenaires sociaux, la police fédérale et la Commission permanente de la police locale, de la création de quatre groupes de travail techniques avec, pour thème, l’approche de la violence contre la police. Un protocole d’accord (309/1) a d’ailleurs été conclu le 26 septembre 2012.
Je tiens toutefois à préciser que, dans le cadre de manifestations, c’est la circulaire CP4 qui s’applique. Cette dernière est le cadre de référence pour la gestion d’événements publics et/ou rassemblements. Ses caractéristiques-clés sont la communication et la négociation entre les différents acteurs en présence, en vue d’amener à la désescalade par des mesures proactives, préventives et des mesures pendant l’événement.
En mars 2016, j’ai réuni différents représentants des groupes de travail dans le but de faire un état des lieux des engagements pris et des actions déjà menées. La grande majorité des engagements a été réalisée ou est en voie de finalisation, comme le sont la protection de l’identité des membres des services de police et l’implémentation du site interne reprenant les informations nécessaires et utiles aux membres de la police.
Lors de leur formation de base, tous les policiers sont formés aux techniques de maîtrise de la violence. Dès qu’ils sont formés et qu’ils intègrent leurs unités respectives, ces mêmes policiers sont censés suivre un entraînement qui consiste en quatre sessions d’entraînement de quatre heures par an au moins. La formation ainsi que les entraînements sont basés sur les quatre piliers repris dans la circulaire GPI 48: la déontologie et attitude psychosociale reprenant notamment les aptitudes à la communication et à la gestion face à la violence; les techniques didactiques d’intervention enseignant aux policiers à faire face à différentes situations; les techniques de maîtrise de la violence sans arme à feu; les techniques de maîtrise de la violence avec arme à feu. En matière de gestion négociée de l’espace public, les policiers apprennent, en outre, à travailler en équipes réparties par sections impliquant des techniques spécifiques à cet engagement opérationnel.
En ce qui concerne la généralisation d’une formation en techniques d’intervention et gestion de la violence, celle-ci existe déjà mais il est prévu, dans le protocole d’accord avec les partenaires sociaux, la police fédérale et la police locale, davantage d’attitudes à la communication dans la formation relative à la maîtrise de la violence (cf. circulaire GPI 48). L’attitude psychosociale est pourtant un des quatre piliers repris dans la thématique d’entraînement de cette circulaire mais concrètement, les exercices de mise en situation de gestion de la violence par la négociation ou la communication sont trop peu présents voire absents.
En ce qui concerne les manifestations, nous ne communiquons pas la liste des personnes. Cette liste reste confidentielle. Mais toute personne à risque, présente à une manifestation, fait l’objet d’une attention particulière des services de police. Cette liste inclut tant des personnes d’extrême gauche que d’extrême droite.
On compte au nombre des personnes arrêtées, 24 manifestants dont 22 le sont pour désordre (arrestations administratives) et 2 pour arrestation judiciaire.
Comme prévu dans la circulaire OOP 41, un dispositif policier important est mis en place par la zone de police, afin d’éviter tout débordement ou d’intervenir en cas d’actes de violence.
Gilles Vanden Burre (Ecolo-Groen): Monsieur le ministre, je vous remercie pour cette réponse très détaillée. Je n’ai pas pu prendre note au vol de l’ensemble des éléments, mais dès que je disposerai de la réponse, je la consulterai en détail.
Il est intéressant d’observer qu’un suivi a été réservé aux décisions prises sous la législature précédente. Il importe de pouvoir assurer à l’avenir un déroulement correct des manifestations. Certes, si leur organisation peut s’avérer compliquée, il est inadmissible que des actes de violence surviennent, à un moment donné, tant envers les manifestants qu’envers les policiers.
Nous resterons attentifs à ce sujet.